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Les procédures en référé des agents ou des syndicats de la fonction publique au tribunal administratif : définition – formulation – envoi et recours

Dans le cadre d’une relation contentieuse avec une administration publique, les citoyens, les agents ou les syndicats de la fonction publique, peuvent être conduits à engager des procédures devant le Tribunal Administratif pour défendre leurs droits.

Les procédures en référé devant le tribunal administratif permettent, sous certaines conditions, d’obtenir des mesures provisoires de suspension ou conservatoires dans un délai plus rapide qu’un recours en contentieux classique.

En fonction du types de référés déposés, le juge des référés doit statuer dans un délai assez rapide, 48 heures le plus souvent.

La procédure en référé permet d’obtenir plus rapidement une première décision de justice, même si le juge administratif ne statue que provisoirement ou à titre conservatoire.

Dispositions législatives

Les principales dispositions législatives et réglementaires qui déterminent les procédures en référé devant le tribunal administratif sont :

loi 2000-597 du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives

Décret 2000-1115 du 22 novembre 2000 relatif au référé devant les juridictions administratives et modifiant le code de justice administrative

Articles L511-1 et suivants et R522-1 et suivants du Code de Justice Administrative

Articles L521-1 à 4 du Code de Justice Administrative déterminant les pouvoirs du juge administratif saisi en référé

Les décisions de la jurisprudence

Ordonnance en référé N°340250 du Conseil d’État du 16 juin 2010 précisant qu’un moyen tiré de l’incompatibilité de dispositions législatives avec les règles du droit de l’Union Européenne est de nature à être retenu et peut créer un doute sérieux sur la légalité de la décision

Arrêt N°347563 du Conseil d’État du 4 juin 2012 précisant qu’un délégué syndical qui ne justifie pas d’un mandat peut s’exprimer au cour d’une audience de référé suspension

Ordonnance en référé N°365459 du Conseil d’État du 14 février 2013 indiquant que le juge des référés saisi pour apprécier si la condition d’urgence doit être regardée comme remplie, il est tenu compte, le cas échéant, de ce que l’intérêt public commande que soient prises les mesures provisoires nécessaires pour faire cesser immédiatement l’atteinte aux droits conférés par l’ordre juridique de l’Union européenne

Arrêt N°381061 du Conseil d’État du jeudi 19 juin 2014 statuant en référé, a indiqué que le droit de ne pas être soumis à un harcèlement moral constitue pour un agent de la fonction publique, une liberté fondamentale au sens des dispositions de l’article L521-2 du code de justice administrative.

Arrêt N°396848 du Conseil d’État du 31 mai 2016 précisant qu’eu égard à son office, qui consiste à assurer la sauvegarde des libertés fondamentales, il appartient au juge des référés libertés, saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative (CJA), de prendre, en cas d’urgence, toutes les mesures qui sont de nature à remédier aux effets résultant d’une atteinte grave et manifestement illégale portée, par une autorité administrative, à une liberté fondamentale, y compris lorsque cette atteinte résulte de l’application de dispositions législatives qui sont manifestement incompatibles avec les engagements européens ou internationaux de la France, ou dont la mise en œuvre entraînerait des conséquences manifestement contraires aux exigences nées de ces engagements.

La capacité à agir en justice des syndicats

Les articles L2132-1 à 6 du Code du Travail et l’article 8 de la loi 83-634 portant droits et obligations des fonctionnaires prévoient que les syndicats de la fonction publique disposent d’une personnalité civile et de la capacité à agir en justice pour défendre des intérêts individuels et collectifs de ses membres, de sa propre défense statutaire et institutionnelle ou contre les décisions portant atteinte aux intérêts collectifs des fonctionnaires.

Cette disposition doit être prévue et inscrite dans les statuts locaux de chaque syndicat qui sont déposés à la Préfecture ou en mairie.

L’organe délibérant de l’organisation syndicale doit voter une délibération pour mandater un représentant du syndicat, pour le représenter en justice dans ses actions.

Cette délibération devra être jointe lors de chaque requête devant le Tribunal Administratif.

Les différents types de référés

Devant le juge administratif, il existe plusieurs procédures de référés :

– le référé liberté, prévu par l’article L521-2 du code de justice administrative, peut être déposé par une personne morale de droit public ou une personne de droit privé délégataire d’un service public, ayant constaté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ( atteinte au droit de grève, libre circulation des personnes,…). C’est une mesure d’urgence, à laquelle une réponse est donnée sous 48 heures. La procédure est libre, ne nécessite pas le recours d’un avocat.

– le référé suspension, prévu par l’article L521-1 du code de justice administrative, peut être déposé si une administration a pris une décision dont l’exécution est imminente. Il doit être impérativement accompagné d’un recours en annulation. Pour être recevable, ce référé doit remplir les conditions d’urgence et l’existence d’un doute sérieux quant à la légalité de la décision

– le référé conservatoire, prévu par l’article L521-3 du code de justice administrative, peut être utilisé pour demander au juge de prendre toute mesure utile pour la conservation d’éléments pouvant ensuite avoir une importance capitale lors d’un recours contentieux ou encore la communication de documents

– le référé provision, prévu par les articles R541-1 à 6 du code de justice administrative, permet de demander une avance sur le montant d’une indemnité refusée par l’administration

– le référé révision, prévu par l’article L521-4 du code de justice administrative, permet de faire appel et réviser sur la base d’éléments nouveaux une ordonnance prise en référé

– le référé instruction, prévu par les articles R532-1 à 4 du code de justice administrative, permet de demander un éclaircissement sur les faits propres à un litige

Il existe aussi d’autres type de référés plus spécialisés : le référé expertise, le référé contractuel, le référé pré-contractuel, le référé fiscal,…

La formulation et l’envoi de la requête en référé

La requête en référé doit être déposée au Greffe du Tribunal Administratif compétent dans une enveloppe portant la mention  » référé  » clairement inscrite. Le terme  » référé  » doit aussi être indiqué sur la requête.

La requête en référé peut aussi être adressé par courrier en recommandé avec accusé de réception. La présence d’un avocat n’est pas indispensable.

Dans le cas du référé liberté, du référé suspension ou du référé conservatoire, le juge des référés doit statuer en urgence dans un délai de 48 heures.

Si la demande est fondée juridiquement, et après avoir pris connaissance des des arguments des deux parties lors d’une procédure contradictoire écrite ou orale, le juge prononcera des mesures provisoires ou conservatoires.

Les mesures prises par le juge du référé ne règlent pas définitivement le litige avec l’administration et seul le jugement sur la requête principale mettra fin à la procédure avec l’administration. Même s’il existe plusieurs types de référés, les plus importants sont le référé liberté, le référé suspension et le référé provision.

Le référé liberté ou injonction

Quand une administration publique, dans l’exercice l’un de ses pouvoirs, prend une décision qui porte une atteinte grave et manifestement illégale à l’une des libertés fondamentales, le référé liberté, prévue par l’article L521-2 du code de justice administrative, permet d’obtenir du juge des référés, dans un délai de 48 heures, une décision de suspension ou d’injonction .

Les mesures susceptibles d’être prononcées par le juge des référés le sont en vue de la sauvegarde de la liberté en cause.

Pour obtenir une décision favorable de suspension ou d’injonction, le demandeur doit vérifier que :

il y a une atteinte à une liberté fondamentale

– cette liberté fait l’objet d’une atteinte grave et que cette atteinte soit manifestement illégale

– il y a une situation d’urgence.

Les libertés fondamentales sont des des libertés essentielles protégées par la loi ou la Constitution : liberté syndicale, droit de grève, la liberté de cultes, de réunion, d’association, droit d’asile,…

La procédure du référé-liberté se dépose au juge des référés qui doit statuer dans les 48 heures. Le demandeur est informé de la date et de l’heure de l’audience publique. En cas de bien fondé, le juge prononce une mesure de sauvegarde, une mesure de suspension ou une mesure d’injonction afin de faire cesser l’atteinte portée à la liberté fondamentale.

Si le référé liberté est rejeté, le recours s’exerce devant le Conseil d’État dans un délai de 15 jours. La présence d’un avocat au Conseil d’État et à la Cour de Cassation est indispensable.

Le référé suspension d’une décision administrative

Dans la majorité des cas, les procédures de recours en annulation d’une décision administrative devant le tribunal administratif ne sont pas suspensives. Ainsi, dans l’attente du jugement du tribunal, la décision administrative va continuer de s’appliquer même après le dépôt d’une requête.

Dans l’attente du jugement de la procédure classique en annulation, il est possible d’engager une procédure en référé suspension pour obtenir la suspension de la décision administrative dans un délai rapide. Si la suspension est prononcée par le juge des référés, même à titre provisoire ou conservatoire, l’administration a l’obligation de ne pas appliquer sa décision.

La demande de référé suspension doit être motivée et remplir deux conditions :

– que les moyens et arguments contenus dans la requête en annulation créent un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée

– que la suspension soit justifiée par l’urgence

Si le référé suspension est rejeté, le recours s’exerce devant la Cour Administrative d’Appel dans un délai de 15 jours. La présence d’un avocat est fortement conseillée.

Pour obtenir une décision favorable de suspension, le demandeur doit :

– avoir déjà déposé préalablement ou simultanément une autre requête en annulation et en joindre une copie

– la décision administrative ne doit pas avoir été entièrement exécutée, car dans ce cas la demande de suspension de son exécution n’aurait plus de sens.

– démontrer que la suspension est justifiée par l’urgence. Cette condition est considérée comme remplie lorsque la décision contestée porte préjudice ou atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, aux intérêts du requérant.

– argumenter sa demande pour tenter de démonter au juge des référés qu’il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision administrative en cause

Le juge des référés peut :

– juger que la demande est fondée et prononcer la suspension. La décision attaquée ne pourra plus être appliquée jusqu’au jugement du tribunal sur la demande principale

– juger que la demande n’est pas fondée et rejeter la suspension

– juger sans audience publique en rejetant la suspension si elle ne présente pas un caractère d’urgence, est irrecevable ou s’il considère que la demande ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative.

Le référé provision sur une indemnité demandée

La procédure du référé provision permet au requérant d’obtenir une avance sur une indemnité que lui a refusé une administration, en attendant que le juge se prononce sur un montant précis.
Le demandeur devra démonter que les raisons avancées par l’administration de lui refuser cette indemnité n’est pas sérieusement contestable.

Dans cette situation, le demandeur peut au choix :

– faire une demande de référé provision au juge des référés

– faire une requête principale et joindre parallèlement un référé provision au juge des référés

La procédure d’appel ou le pourvoi en cassation d’un jugement en référé

Toutes les ordonnances du juge des référés sont susceptibles d’appel devant la Cour Administrative d’Appel dans le délai de 15 jours après leur notification. Toutefois, dans le cas d’un recours d’une ordonnance d’un référé liberté, il s’effectue devant le Conseil d’État dans le même délai de 15 jours.

Pour les référés suspension et les référés conservatoires, les recours s’exercent aussi en cassation devant le Conseil d’État dans le même délai de 15 jours, mais la présence d’un avocat est obligatoire pour ce pourvoi.

Les référés ne comportant pas de caractère définitif, il est toujours possible de faire appel d’une ordonnance sur la base d’éléments nouveaux apportés par l’une ou l’autre des parties sans limitation de délai.

Pour aller plus loin

Lire l’article sur : Le droit syndical dans la fonction publique territoriale – législation – locaux syndicaux – ASA – temps syndical – réunion mensuelle d’information

Lire l’article sur : la contestation d’une décision administrative – recours gracieux – recours en annulation ou plein contentieux devant le Tribunal Administratif

Lire l’article sur : la capacité et les intérêts à agir en justice des syndicats devant une juridiction civile – pénale ou administrative

Lire l’article sur : la distribution et l’affichage des tracts syndicaux dans un établissement public ou privé – législation – jurisprudence – délai de prescription de l’employeur

Lire l’article sur : les juridictions civiles – pénales et administratives et les procédures en contentieux

Lire l’article sur : le congé de formation syndicale des agents dans la fonction publique territoriale – agents concernés – durée – recours en cas de refus

Lire l’article sur : le référé liberté pour atteinte au droit de grève dans la fonction publique

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