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L’obligation de sécurité de résultat de l’employeur – la faute inexcusable : définition – législation – jurisprudences – procédure au TASS ou TGI

L’obligation de sécurité de résultat oblige l’employeur de prendre toutes les mesures nécessaires et efficaces pour assurer la sécurité et protéger la santé, physique et mentale, des travailleurs.

Ainsi, l’employeur est tenu, envers ses salariés, de les protéger de la survenue d’accident du travail et de maladie professionnelle.

A défaut, il s’expose à la faute inexcusable qui accorde au salarié concerné, ou à ses ayant-droits, la réparation financière du préjudice subi devant le TASS – Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale.

A compter du 1er janvier 2019, les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale, du contentieux de l’incapacité et de l’aide sociale sont supprimées et le contentieux relèvera, pour ce qui concerne l’ordre judiciaire, de tribunaux de grande instance et de cours d’appel spécialement désignés, et pour ce qui concerne l’ordre administratif, respectivement des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel.

Dispositions législatives

Les principales dispositions législatives et réglementaires qui déterminent l’obligation de sécurité de résultats et la faute inexcusable d’un employeur sont :

Article L4121-1 du Code du Travail sur les obligations des employeurs sur les principes généraux de prévention de la santé et de la sécurité des salariés

Article L452-1 du Code de la Sécurité Sociale sur la faute inexcusable ou intentionnelle de l’employeur

Article 1147 du Code Civil sur les dommages et intérêts résultant de l’inexécution de l’obligation

Décret 2014-13 du 8 janvier 2014 relatif aux modalités de récupération des majorations de rente versées aux salariés par les caisses de sécurité sociale en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle imputable à une faute inexcusable de l’employeur

Circulaire CNAMTS N°11-2014 du 10 juin 2014 relative aux modification des règles d’opposabilité et de remboursement des conséquences financière en matière de faute inexcusable de l’employeur

Décret 2015-653 du 10 juin 2015 portant application au partenaire d’un pacte civil de solidarité et au concubin de dispositions prévues en matière de rentes d’ayants droit au livre IV du code de la sécurité sociale et extension aux régimes des salariés et des non-salariés agricoles de dispositions prévues au même code en matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles

Décret 2018-772 du 4 septembre 2018 désignant les tribunaux de grande instance et cours d’appel compétents en matière de contentieux général et technique de la sécurité sociale et d’admission à l’aide sociale

Décret 2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale

Les décisions de la jurisprudence

Arrêt N°00-10051 de la Cour de Cassation du 28 février 2002 indiquant l’obligation de sécurité et de résultat de l’employeur en matière de protection de la santé des salariés

Arrêt N°00-16535 de la Cour de Cassation du 11 avril 2002 précisant que l’employeur est tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail

Arrêt N°03-44412 de la Cour de Cassation du 29 juin 2005 précisant qu’un employeur doit respecter son obligation de sécurité de résultat vis-à-vis de ses salariés en ce qui concerne leur protection contre le tabagisme dans l’entreprise.

Arrêt N°05-44580 de la Cour de Cassation du 13 décembre 2006 indiquant que l’employeur est tenu à une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés dont il doit assurer l’effectivité

Arrêt N°06-45888 de la Cour de Cassation du 5 mars 2008 indiquant que l’obligation de sécurité de résultat à laquelle est tenu l’employeur lui impose d’adopter les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs et lui interdit en conséquence de prendre, dans l’exercice de son pouvoir de direction et dans l’organisation du travail, des mesures qui auraient pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité des salariés

Arrêt N°08-44019 de la Cour de Cassation du 3 février 2010 précisant que l’obligation de sécurité de résultat d’un employeur s’applique si un salarié est victime sur le lieu de travail de violences physiques ou morales ou des agissements de harcèlement moral.

Arrêt N°08-40144 de la Cour de Cassation du 3 février 2010 indiquant que l’obligation de sécurité de résultat d’un employeur même s’il avait pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements

Décision 2010-8 QPC du 18 juin 2010 sur la faute inexcusable de l’employeur indiquant que le salarié victime peut demander au Tribunal de la Sécurité Sociale, la réparation de tous ses préjudices, mêmes ceux qui ne sont pas explicitement visés par l’article L452-3, par exemple les frais d’adaptation du logement ou du véhicule

Arrêt N°10-20178 de la Cour de Cassation du 1er juin 2011 indiquant que la transaction par laquelle un employeur propose à un salarié de renoncer à agir en responsabilité à son encontre pour faute inexcusable moyennant une indemnisation de 10.000 € est nulle de plein droit

Arrêt N°320744 du Conseil d’État du 22 juin 2011 considérant qu’un agent contractuel de droit public peut demander au juge administratif la réparation par son employeur du préjudice que lui a causé l’accident du travail dont il a été victime, dans la mesure où ce préjudice n’est pas réparé par application du Code de la sécurité sociale, lorsque cet accident est dû à la faute intentionnelle de cet employeur ou de l’un de ses préposés. De plus, l’agent peut également exercer une action en réparation de l’ensemble des préjudices résultant de cet accident, contre son employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, en cas de faute inexcusable de ce dernier, ou contre une personne autre que l’employeur ou ses préposés, conformément aux règles du droit commun.

Arrêts N°11-15393 de la Cour de Cassation du 4 avril 2012 précisant qu’en cas de faute inexcusable de l’employeur, la victime peut prétendre à la réparation des préjudices qui ne sont pas couverts, en tout ou partie, en application du livre IV du code de la sécurité sociale

Arrêt N°11-20074 de la Cour de Cassation du 29 mai 2013 précisant que l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail, qu’il soit ou non la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité est de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale

Arrêt N°12-22156 de la Cour de Cassation du 19 septembre 2013 indiquant, au sujet du suicide d’un salarié de la société RENAULT, que l’employeur aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’avait pas pris de mesures suffisantes pour l’en préserver. Cela justifie la faute inexcusable de l’employeur à l’origine du suicide du salarié

Arrêt N°342468 du Conseil d’État du 9 novembre 2015 estimant que, lorsque la faute de l’administration et celle d’un tiers ont concouru à la réalisation d’un même dommage, le tiers co-auteur qui a été condamné par le juge judiciaire à indemniser la victime peut se retourner contre l’administration en invoquant la faute de cette dernière, y compris lorsqu’il a commis une faute inexcusable au sens de l’article L452-1 du Code de la sécurité sociale.

Arrêt N°15-24037 de la Cour de Cassation du 9 février 2017 indiquant que l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur ne peut être engagée qu’à l’encontre de l’employeur de la victime.

L’obligation de sécurité et de résultat de l’employeur

L’article L4121-1 du Code du Travail impose à l’employeur de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures d’obligation de sécurité envers les salariés comprennent :

– Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail

– Des actions d’information et de formation

– La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

De plus, l’employeur doit veiller à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

Depuis 2002, plusieurs arrêts de la Cour de Cassation ont précisé que l’obligation générale de sécurité des employeurs était une obligation de sécurité de résultat dans le domaine de la protection de la santé et de la sécurité des salariés.

Ainsi, les mesures de sécurité sont assorties d’une obligation de résultat pour l’employeur.

Cette obligation de sécurité de résultat s’applique si un salarié est victime sur le lieu de travail de violences physiques ou morales, des agissements de harcèlement moral.

L’obligation de sécurité de résultat est un Principe Général du Droit dont l’employeur doit assurer l’effectivité et l’efficacité. En cas de contentieux juridique, l’employeur aura la charge de la preuve qu’il a pris toutes les mesures nécessaires efficaces pour remplir son obligation de sécurité.

A défaut, la responsabilité de l’employeur est engagée de plein droit, même s’il avait pris des mesures en vue de faire cesser ces faits.

La faute inexcusable de l’employeur

La notion de faute inexcusable de l’employeur est prévue à l’article L452-1 du Code de la Sécurité Sociale.

Elle peut être retenue contre un employeur, si un ou des travailleurs étaient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un représentant du personnel au CHSCT – Comité d’Hygiène Sécurité et des Conditions de Travail – avaient signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé.

Ainsi, en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat.

Le manquement à cette obligation a le caractère de faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver

En cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur par le TASS, la victime ou ses ayants droit reçoivent une majoration des indemnités qui leur sont dues.

La décision 2010-8 QPC du 18 juin 2010 sur la faute inexcusable de l’employeur a indiqué que le salarié victime d’une faute inexcusable ou sa famille peut demander au Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale, la réparation de tous ses préjudices, mêmes ceux qui ne sont pas explicitement visés par l’article L452-3, par exemple les frais d’adaptation du logement ou du véhicule.

La procédure de reconnaissance de la faute inexcusable par le salarié

Le salarié concerné devra envoyer un courrier en recommandé avec accusé de réception à la caisse de sécurité sociale dont il dépend, en indiquant qu’il invoque la faute inexcusable de son employeur.

Si la conciliation échoue, jusqu’au 31 décembre 2018, le salarié devra saisir le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale – TASS. Le délai de prescription est fixé à 2 ans à compter du jour de l’accident ou de la cessation du paiement de l’indemnité journalière.

A compter du 1er janvier 2019, les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale, du contentieux de l’incapacité et de l’aide sociale sont supprimées et le contentieux relèvera, pour ce qui concerne l’ordre judiciaire, de tribunaux de grande instance et de cours d’appel spécialement désignés, et pour ce qui concerne l’ordre administratif, respectivement des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel.

La reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur engendre la réparation intégrale des victimes d’accident du travail ou maladie professionnelle.

La réparation financière – les indemnités pour faute inexcusable

En cas de faute inexcusable, indépendamment de la majoration de rente, la victime a le droit de demander à l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale  :

– une majoration de la rente versée par la Sécurité Sociale

– la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales

la réparation du préjudice de perte d’emploi en cas de licenciement pour inaptitude physique

– la réparation de ses préjudices esthétiques et d’agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle

des indemnités pour les frais d’aménagement du logement et d’un véhicule adapté en raison du handicap, le déficit fonctionnel temporaire, le préjudice sexuel

– Si la victime est atteinte d’un taux d’incapacité permanente de 100 %, une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation.

– en cas d’accident suivi de mort, la réparation du préjudice moral pour les ayants droit de la victime m

La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l’employeur.

Ainsi, il est important que les membres du CHSCT des établissements publics ou privé signalent aux employeurs toutes les situations de dangers potentiels. Ils veilleront aussi à ce que leurs propos soient fidèlement retranscris sur les procès-verbaux du CHSCT, qui pourront servir d’éléments de preuve lors d’une procédure judiciaire.

Pour aller plus loin

Lire l’article sur : un employeur doit respecter son obligation de sécurité de résultat vis-à-vis de ses salariés contre le tabagisme dans l’entreprise

Lire l’article sur : un employeur doit respecter son obligation de sécurité de résultat sur le repos hebdomadaire légal du salarié

Lire l’article sur : CHSCT – la faute inexcusable de l’employeur – la procédure pour DGI Danger Grave et Imminent – le droit de retrait des salariés

Lire l’article sur : l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail d’un salarié est de la compétence exclusive du TASS – tribunal des affaires de sécurité sociale

Lire l’article sur : un employeur ne peut pas négocier sa responsabilité pour faute inexcusable lors d’un accident du travail d’un salarié

Lire l’article sur : le jugement du TASS de Versailles du 27 juin 2013 a condamné Renault pour faute inexcusable après le suicide d’un salarié

Lire l’article sur : la définition d’un État de Droit – les libertés et les droits fondamentaux en France – les PDG – principes généraux du Droit

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